Article de presse

Attentats de janvier 2015 : des plaintes contre l’Etat

Des victimes de la prise d’otages de l’Hyper Cacher lancent de nouvelles procédures

Deux ans après les attentats de janvier 2015, le dossier d’instruction, avec ses 65 tomes, ses 8 988 procès-verbaux et 800 témoins, n’est pas encore clos. Mais cette enquête hors norme a déjà permis de faire la lumière sur une grande partie de l’organisation et du déroulement des attentats de Charlie Hebdo, de Montrouge et de l’Hyper Cacher Du côté des victimes et de leurs familles, les plaies sont encore vives. Parmi celles de l’Hyper Cacher, beaucoup ont émigré pour tenter de les panser en Israël. D’autres, restées en France, ne trouvent pas la paix, oscillant entre incompréhension et colère. Au point de lancer aujourd’hui une procédure administrative contre l’État. Elle émane de David et de Raphaël, parties civiles dans la procédure pénale.

Le premier, garé devant l’Hyper Cacher, est un témoin direct de l’attentat. Sa voiture a été criblée de 18 impacts de balle. C’est lui qui a vu Amedy Coulibaly arriver armé sur les lieux et qui l’a identifié auprès des policiers. Le second, 16 ans, est orphelin de Philippe Braham, l’une des quatre personnes tuées dans l’épicerie.

Un an après avoir adressé une quinzaine de mises en demeure aux services concernés de police et aux différentes administrations de l’État, et face à « leurs réponses insatisfaisantes », les deux jeunes hommes et leur avocat, Me Axel Metzker, s’apprêtent à saisir la justice. Dix fautes administratives ont été commises, selon eux. Ils s’appuient notamment sur « 40 procès-verbaux qui mettent en cause la responsabilité de l’État », indique Me Metzker. Pour eux, la principale faute est la « non-diffusion » puis la « diffusion tardive » de la photo d’Amedy Coulibaly « alors que les services de police en disposaient 24 heures avant l’attentat de l’Hyper Cacher », soit après qu’il avait commis le meurtre, le 8 janvier, de la policière municipale de Montrouge, Clarissa Jean-Philippe. « Cette diffusion était déterminante, rage David, avec elle le scénario aurait été changé, la tragédie de I’Hyper Cacher aurait peut-être pu être évitée.

Une succession de fautes

Cette photo ne sera en effet diffusée que le 9 janvier à 15 heures via Twitter par la préfecture de police de Paris, alors que Coulibaly prend la supérette en otage depuis près de deux heures et que le vice-procureur au parquet antiterroriste du tribunal de grande instance de Paris, Camille Hennetier, « donne l’ordre de la diffuser le matin même à 11h10 à un officier de la SDPJ 92 qui ne le fait pas », se révolte Me Metzker. « Pourquoi avaient-ils cette photo et pas la communauté juive dont il est avéré qu’elle était en danger et expressément visée par Coulibaly ? interroge-t-il. Nous voulons comprendre ce qui s’est passé entre le 8 et le 9 janvier. »

Parmi les autres « fautes » de l’État visées par sa procédure, il y a aussi « cette enquête de voisinage ridicule à Montrouge pour montrer sa photo aux riverains », « une perte de temps » et « une faute gravissime quand on peut la publier partout en 2015 » via tous les systèmes numériques. David et Raphaël soulèvent d’autres fautes administratives encore : « l’absence de surveillance » de Coulibaly depuis sa remise en liberté en juin 2014 « malgré tous ses antécédents », et l’occultation du rapport Wagner – un rapport de 2007 sur la filière des Buttes-Chaumont où « les intentions antisémites des djihadistes sont avérées et programmées contre la communauté juive »…

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Auteur : Delphine de Mallevoüe
Photo : Kenzo Tribouillard/AFP

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